5.8.05

On a quitté la terre


Mostafa* de se penche vers le hublot pour contempler la terre peut-être pour la dernière fois, car lors d'un précédent voyage il a faillit ne pas revenir. La planète bleue devenait de plus en plus petite au fur et à mesure que le vaisseau s'en éloignait. Dans quelques heures, après la fin de tous les check-lists et le conditionnement de spationautes, il rentrera en hibernation pour un voyage qui va durer deux années terrestres et qui mènera l'équipage vers Miros, une planète hors du système solaire, découverte il y a à peine quelques mois et qui n'arrête pas d'envoyer des signaux depuis. Mostafa était serein, mais l'impossibilité de décrypter ce signal renforçait son scepticisme par rapport à cette mission. Les logiciels de la compagnie étaient pourtant réputés être parmi les plus aboutis en la matière, mais les séquences du signal étaient elles, particulièrement compliquées. C'est d'ailleurs l'une des raisons qui ont poussé la compagnie à envoyer un équipage sur place. Il est vrai que les analyses spectrales avaient révélé la présence d'admonium et d'autres métaux rares dans les entrailles de Miros, ce qui constituait une raison suffisante pour dépêcher une mission d'exploitation sur place, mais ce signal n'avait rien d'organique et la seule certitude qu'avait l'équipe de recherche, c'est qu'il comportait des séquences logiques et qu'il se répétait à intervalles réguliers.
Les humains étaient très avancés en matière de recherche spatiale, depuis que la terre a commencé à manquer de ressources énergétiques, et la seule manière de s'en procurer, était d'aller les chercher sur d'autres planètes. Mais ce phénomène était une première dans l'histoire de la conquête spatiale. Quelques années auparavant, les scientifiques avaient conclus, à tort ou à raison, que s'il existait réellement une forme de vie intelligente dans un espace interstellaire contenant un millier de galaxies, la technologie aurait pu les débusquer. Au-delà, il serait difficile, voire impossible qu'un contact puisse être envisagé. Car il existerait logiquement, selon ces mêmes scientifiques, ce qu'ils appellent la barrière spatiotemporelle qui bloquerait la propagation des ondes, ce qui rendrait insondable l'univers à partir d'une certaine profondeur. Mostafa n'était pas de cet avis, ce qui renforçait son scepticisme et l'excitait en même temps. Il ne pouvait pas concevoir un univers aussi grand avec pour seuls habitants ceux de la terre. L'expérience qu'il avait vécue avec les premiers voyages sur Mars et la découverte de traces de vie emprisonnées avec l'eau dans les profondeurs de la planète rouge, confortait son idée qu'un jour, un contact serait possible. Et cette récente découverte pourrait lui donner raison. En attendant il fallait se préparer pour le grand saut.
-"Votre attention, s'il vous plait, check-list à 82%. Veuillez rejoindre le sanctuaire pour le dernier briefing avant la phase deux du voyage"
Mostafa n'arrivait pas à se détacher du hublot, pourtant, il fallait y aller. Il avait comme un pressentiment qu'à son réveil, sa vie basculera, ou qu'il ne reverra plus jamais les sien laissés sur terre…

* prénom provisoir